Sept mois après avoir débarqué en Égypte et s’être assuré du contrôle de la majeure partie du pays, Napoléon Bonaparte décide d’engager une nouvelle offensive militaire en direction de la Syrie afin de contrer l’avance des Ottomans et de gêner les approvisionnements des Anglais. L’expédition de Syrie s’inscrit donc bien dans l’extension de la guerre de la deuxième coalition qui ne touche plus seulement l’Europe, mais vient désormais frapper aux portes de l’Asie.
Par Jacques-Olivier Boudon, Professeur à l’université Paris-Sorbonne et président de l’Institut Napoléon
Depuis le débarquement de l’armée française en Égypte en juillet 1798, les combats se sont poursuivis d’une part en Haute-Égypte où le général Desaix continue de pourchasser Mourad Bey, mais aussi dans le delta, tandis que les forces d’occupation ont dû faire face à la révolte du Caire en octobre, puis à une résistance larvée de la part des bédouins du désert. Mais l’armée française n’avait pas encore dû contrer l’intervention d’armées étrangères, les Anglais, après avoir détruit la flotte française à Aboukir, se contentant de croiser aux larges des côtes, en attendant leur heure. Or l’expédition d’Égypte a aussi pour conséquence de faire entrer dans la seconde coalition l’Empire ottoman et la Russie dont les flottes combinées ont gagné la Méditerranée orientale pour mettre le siège devant Corfou. Les ennemis d’hier se sont pour l’heure réconciliés afin d’empêcher l’extension de la puissance française en Orient. La Syrie devient dès lors l’enjeu d’un bras de fer entre puissances.
Enjeux géopolitiques de la campagne
Pour Bonaparte, la prise de la Syrie doit permettre de stabiliser la conquête de l’Égypte, en assurant la sécurité du pays en direction du Nord, mais il sait aussi qu’en s’emparant de la Syrie, il peut s’ouvrir, tel Alexandre, la route terrestre de l’Inde et menacer ainsi les intérêts anglais. Ceux-ci ne s’y sont pas trompés. Dans le même temps, ils en profitent pour consolider leurs positions en Inde, en s’appuyant sur la Perse, contre les Afghans, puis en s’attaquant au sultan de Mysore. La Syrie est alors dominée par le pacha Al-Jazzar qui contrôle le pays au nom du sultan ottoman. Né en Bosnie, vendu comme esclave, il avait intégré le système mamelouk en Égypte, avant de gagner Constantinople puis la Syrie, devenant pacha de Damas à la fin des années 1780. Après l’entrée en guerre de l’Empire ottoman contre la France, il est chargé de reprendre l’Égypte, avec ses propres troupes, épaulées par des forces ottomanes. C’est dans ce contexte qu’il envoie un de ses généraux, Abdallah, à la tête de 12 000 hommes, occuper Gaza, puis s’emparer de la place d’El-Arich, en janvier 1799, menaçant directement le nord de l’Égypte. […]
Retrouvez l’intégralité de l’article dans le n°77 en vente en ligne sur boutique.soteca-editions.fr.