La ville de Versailles vit comme le reste de la France au rythme des événements qui secouent le pays en cette année 1814-1815 si riche en soubresauts. En 1814, elle subit une occupation d’une quinzaine de jours. Les conséquences des Cent-Jours sont beaucoup plus dramatiques, puisque les troupes étrangères occupent la ville pendant six mois.
Par Jacques-Olivier Boudon Professeur à l’université Paris-Sorbonne
L’annonce du débarquement de Napoléon à Golfe-Juan le 1er mars 1815, connu à Versailles cinq jours après, provoque la consternation au sein d’une population largement acquise à la monarchie. La restauration des Bourbons avait été perçue en 1814 comme une chance de renouveau pour une ville encore fortement marquée par la présence royale avant 1789, et qui pouvait espérer un regain d’intérêt de la part de Louis XVIII.
Le retour de « l’Usurpateur»
« Nous avions joui de neuf mois de calme et de paix après le retour de la famille des Bourbons sur le trône de leurs ancêtres, et Versailles commençait à reprendre une nouvelle vie sous les meilleurs auspices, raconte le maire de la ville, le chevalier de Jouvencel ; les travaux du château se poussaient avec activité, et quelques mois encore auraient suffi pour rendre à cette ville une partie de son ancienne splendeur. Les habitants, généralement dévoués par inclinaison autant que par intérêt à la famille royale, jouissaient déjà des bienfaits du roi et savaient les apprécier, lorsqu’on apprit, au commencement de mars, le débarquement en France de « l’Usurpateur » qui n’avait jamais manifesté qu’une froide indifférence pour Versailles et son magnifique palais. » L’accusation est sévère dans la mesure où Napoléon s’est régulièrement préoccupé du château et du domaine de Versailles, sans toutefois, il est vrai, le rendre à son lustre d’antan.
Dès le 9 mars, le conseil municipal rédige une adresse au roi manifestant l’attachement de la ville à la cause de la monarchie. Dans le même temps, nombre de jeunes Versaillais intègrent la garde nationale alors mobilisée pour lutter contre le retour de Napoléon, ou s’engagent parmi les «Volontaires royaux ». L’agitation grandit à l’annonce du départ du roi le 20 mars. Le maire doit alors maintenir l’ordre dans la ville, et éviter les rixes entre volontaires royaux prêts à partir pour défendre Louis XVIII et partisans de Napoléon, présents notamment parmi les officiers en demi-solde. La transition s’opère sans heurt, ce qui permet au chevalier de Jouvencel de rester provisoirement à la tête de la mairie, et de se prononcer clairement, dans la séance du conseil du 11 avril, en faveur du nouveau régime, tout en rappelant son attachement à la monarchie. Il met en avant sa volonté d’empêcher la guerre civile et d’assurer la défense de la nation menacée par l’étranger. Le conseil s’empresse alors de rédiger une adresse de respectueux dévouement à l’égard de Napoléon, dans laquelle il regrette toutefois « la cessation subite des travaux au château ».
Une délégation conduite par le maire est reçue par Napoléon le 11 avril, l’empereur annonçant son intention d’en poursuivre à terme la restauration. Jouvencel, menacé d’être démis, préfère se retirer en mai, laissant la municipalité vacante au moment de l’invasion de la France. […]
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