«[…] Lorsque les princesses du sang ou d’autres dames mangeaient à la table du Roi, c’étaient non pas les gentilshommes servants mais d’autres officiers de la maison du Roi qui nous servaient, et ceux-ci se trouvaient derrière nous comme des pages. […] Les pages ne servaient à la table du Roi que lorsqu’il était en voyage, et ils ne servaient pas la famille royale ; elle était servie par des gens qui n’étaient pas gentilshommes. Anciennement, tous les officiers du Roi, tels que ceux de l’échansonnerie, du gobelet, du fruit, etc., étaient gentilshommes ; mais depuis que la noblesse est devenue pauvre, et que toutes les charges se sont payées cher, il a fallu prendre de bons bourgeois qui eussent de l’argent.» Bien qu’elle ne se soit jamais faite à « cette insipide étiquette», la princesse Palatine, belle-soeur de Louis XIV, comme elle le montre dans cette lettre du 15 octobre 1719, était très regardante sur les principes. En fine observatrice de la cour, et des repas en particulier, elle peut servir de fil rouge pour ce «temps de cour» important de la journée du Roi.
Le repas du Roi
À l’instar des autres grands moments de la vie quotidienne du souverain, les repas sont extrêmement ritualisés. De nombreux règlements de dizaines d’articles, hérités des grands règlements d’Henri III, ont ainsi été édictés pour préciser « l’ordre que le Roi veut être observé à ces occasions ». L’un des plus célèbres reste l’ordonnance du Grand Maître de la Maison du Roi, datée du 7 janvier 1681 et qui précise le cérémonial. Des formes bien codifiées s’offrent au Roi, suivant les circonstances. Concrètement, il y a deux possibilités : le repas pris en public et le repas pris en particulier, chacun desquels peut pourtant à nouveau se décliner. Les États de la France, ces petits recueils qui paraissent irrégulièrement depuis le début des années 1660 et qui répertorient non seulement le nom des différents officiers au service du roi, mais qui surtout décrivent scrupuleusement sa journée, évoquent ainsi «L’ordre du dîner du Roy quand il mange en public» : «Lorsque le Roy mange dans sa Chambre ou dans son Sallon à son petit couvert», «Lorsque le Roy donne à manger en particulier aux Princesses & aux Dames au retour de la chasse», etc.
Mathieu da Vinha, Directeur scientifique du Centre de echerche du château de Versailles.
Pour découvrir la suite de l’article, commandez en ligne le magazine Château de Versailles n°3 sur boutique.soteca-editions.fr