Le général Loyzeau de Grandmaison est accusé depuis de nombreuses années, en fait dès la fin de la Grande Guerre, d’avoir été le chantre de l’offensive à outrance et le principal responsable des hécatombes du début du conflit ; beaucoup de généraux de la guerre ont évoqué Grandmaison dans leurs mémoires, écrits ou souvenirs, souvent pour mieux se défausser de leur propre responsabilité.
Texte du Général 2s André Bourachot, Historien
Même Joffre le cite, parlant de lui comme « soutenant dans deux célèbres conférences […] cette théorie outrancière avec un éclat qui la rendit à son tour dangereuse ». On est un peu surpris de voir évoquer par un maréchal de France les propos d’un officier qui n’était à l’époque qu’un simple lieutenant-colonel. Depuis, avec une belle unanimité, l’historiographie, tous auteurs confondus, a suivi et fait du général de Grandmaison un bouc émissaire sans s‘interroger beaucoup plus avant sur la réalité des faits qui lui sont reprochés. Comment et pourquoi cet officier a-t-il pu susciter des réactions aussi nombreuses et unanimes dans la condamnation?
Qui est Grandmaison ?
Grandmaison est né le 18 janvier 1861 au Mans ; il entre à Saint-Cyr (promotion d’Égypte, 1881-1883) en octobre 1881 en même temps que le futur aide-major général de Joffre, le général Berthelot né la même année, avec lequel il ne cessera de partager des idées identiques. Ils auront un parcours professionnel à peu près semblable et cela n’est certainement pas le fruit du hasard. Les deux serviront en Algérie, en Indochine puis à l’État-Major de l’Armée (E. M.A.), et se succéderont au commandement du même groupe de divisions de réserve ! À la sortie de l’école, classé 13e, il choisit l’infanterie et rejoint le 20e bataillon de chasseurs à pieds.
En janvier 1883, muté au 1er Régiment étranger (Légion étrangère) sur sa demande, « dans le désir et l’espoir de faire campagne » écrit son auteur, il quitte la France pour l’Algérie et, de là, part pour le Tonkin en août de la même année. Il n’en reviendra qu’en mars 1896 et publiera ses réflexions sur la colonisation dans un fort intéressant ouvrage dédié à Gallieni qui lui signera une préface élogieuse. Son séjour s’est partagé entre l’opérationnel – un peu – et ce qu’on appellerait la pacification – beaucoup – du secteur de Dong Dang. Il s’investit complètement dans sa tâche et il faut lire l’enthousiasme que met Grandmaison à ouvrir des routes, cultiver la badiane ou comprendre… le régime de la propriété ! Lyautey, qui servait également à l’époque au Tonkin, le rencontre alors et le cite dans ses Lettres du Tonkin et de Madagascar en écrivant à son correspondant: « Il ferait votre conquête à tous ». […]
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