Hubert de Givenchy est l’un des plus grands couturiers français. Créateur de la marque éponyme, il habilla les plus belles femmes du monde comme Audrey Hepburn. Amoureux du beau, il ne reste pas insensible aux beautés de Versailles dont il garde d’émouvants souvenirs avec Gérald Van der Kemp…
Propos recueillis par Mathieu da Vinha Directeur scientifique du Centre de recherche du château de Versailles
Pouvez-vous nous parler de votre premier souvenir avec Versailles?
Hubert de Givenchy : Tout en étant beauvaisien et avec des ascendants administrateurs des manufactures de Beauvais ou des Gobelins, ce qui constituait un terreau favorable, je ne suis pas venu dans ma jeunesse à Versailles. J’y suis allé bien plus tard, mais j’ai alors tout de suite été passionné. J’ai surtout eu la chance de rencontrer Gérald Van der Kemp, le conservateur en chef du château, et son épouse Florence, avec lesquels je suis devenu très ami. Ils ont énormément oeuvré pour le château. Cette rencontre coïncidait aussi avec mon activité professionnelle : la plupart des dames fortunées qui faisaient des dons à Versailles étaient des clientes, telle Barbara Hutton [héritière des magasins Woolworth]. Toutes furent très généreuses avec ce monument qu’elles aimaient profondément. Sachant parfaitement et merveilleusement recevoir et accueillir ces personnes, Gérald Van der Kemp a ainsi pu obtenir d’importants dons pour Versailles. Reçus dans un cadre si agréable, ses hôtes le quittaient en voulant absolument le remercier, ce qui profitait immanquablement au château
Avez-vous des anecdotes particulières à ce sujet?
H. de G. : Van der Kemp m’a un jour demandé si Bunny Mellon [philanthrope et horticultrice], une de mes amies, aimait Versailles. Celle-ci goûtait plutôt la peinture contemporaine mais avait un goût immodéré pour l’architecture des jardins. Gérald Van der Kemp avait organisé un petit dîner entre amis en son honneur, à l’issue duquel il nous avait guidés à travers le château. C’était époustouflant : alors que nous étions parvenus à la galerie des Glaces, et regardions par les fenêtres, les jardins s’illuminèrent et les eaux des fontaines jaillirent. Mme Mellon en fut émerveillée, et voulut remercier son hôte. On savait déjà que Van der Kemp, atteint par la limite d’âge, devait quitter son poste prochainement, et Mme Mellon en voulait beaucoup à Giscard d’Estaing de ne pas prolonger son mandat. Comme elle le savait en partance pour Giverny, alors totalement à l’abandon, elle opta finalement pour un don qui permit le paiement de quatre jardiniers pendant quatre ans, afin que l’ancien conservateur pût mener chez Monet une action identique à celle qu’il avait menée pendant plus de vingt-cinq ans à Versailles.
Bunny Mellon était un sacré personnage! […]
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