Joseph Perceval, notes et itinéraires de guerre d’un tringlot

Des milliers de soldats ont tenu des carnets pendant la Première Guerre mondiale. Celui de Joseph Perceval est original à plus d’un titre. En effet, ce jeune soldat de la classe 1910 sert dans un escadron du train en 1914. De tels témoignages portant sur les marches de la guerre sont plus rares que ceux laissés par des fantassins. Enfin, en 1915, ce père de deux enfants est durement frappé par le destin puisque sa femme décède alors qu’il est au front. Retour sur les notes et l’itinéraire de ce tringlot…
Par Commandant Michaël Bourlet, Écoles militaires de Saint-Cyr Coëtquidan

Joseph François Perceval est né aux Marches (Savoie) le 26 septembre 1880. Ce petit bourg rural, berceau de la famille, est un point de passage entre la Combe de Savoie et la vallée du Grésivaudan. Il est surplombé par le mont Granier, qui culmine à près de 2000 m. Joseph cultive la terre, quand il est déclaré bon au service par le conseil de révision. Il est incorporé dans les batteries alpines du 2e régiment d’artillerie de Grenoble le 16 septembre 1901 puis est affecté au 14e escadron du train des équipages en novembre 1902. Envoyé dans la disponibilité le 16 avril 1904, il effectue plusieurs périodes d’exercice avec le 14e escadron du train (septembre-octobre 1907 et août-septembre 1910).

Vers 1907, alors qu’il semble s’être installé à Paris, il rejoint son village natal où il épouse Louise Félicité Angelier en 1909. De cette union naissent deux garçons, Albert le 27 février 1910 et Joseph le 1er décembre 1911. À la veille de la Première Guerre mondiale, la famille vit dans une ferme située au coeur des « Abymes » de Myans, près d’un petit lac.

Un Savoyard conducteur au 14e escadron du train des équipages militaires

Rappelé à l’activité par le décret de mobilisation générale, Joseph rejoint le 14e escadron du train des équipages militaires à Lyon le 3 août 1914. En 1914, l’arme du train est composée en France de 20 escadrons (un par corps d’armée). Le 14e est l’escadron du 14e corps d’armée mobilisé dans la 14e région militaire. Les unités du train sont chargées des dépôts de remonte mobile et assurent les transports militaires (convois administratifs des corps d’armée et des armées, boulangeries de campagne, formations sanitaires, etc.). À la mobilisation, les escadrons se dédoublent en escadrons de l’armée active, rattachés aux corps d’armée, et en escadrons territoriaux. Le 14e escadron est constitué de trois compagnies en temps de paix. À la mobilisation, l’escadron actif est fort de 14 compagnies (13 compagnies numérotées de 1 à 13 et une compagnie de dépôt, la 40e compagnie) et l’escadron territorial formé de neuf compagnies (huit compagnies numérotées de 21 à 28 et une compagnie de dépôt, la 41e compagnie). Au total, le 2 août 1914, l’escadron mobilise 104 officiers, 7215 hommes et 8250 chevaux attelant 2346 voitures.

Pendant les premiers jours, Joseph Perceval trouve « le temps long ». Le « système débrouille » permet à ces soldats cantonnés dans la caserne de se nourrir et de se vêtir. Le 7 août, pour rompre avec la monotonie, il se porte volontaire pour assurer le ravitaillement du 3e régiment de chasseurs d’Afrique. Parti d’Algérie le 3 août et débarqué à Sète le 7 août, ce régiment de cavalerie arrive à Lyon à partir du 9 août. Il débarque à la gare de la Guillotière puis cantonne au marché aux bestiaux (quartier Vaise). Le 10 août, le régiment prend livraison de deux voitures ambulances à deux roues, de cinq fourgons forge, d’une voiture à viande et 12 à vivres, 48 chevaux de trait avec harnachements et de 25 conducteurs, parmi lesquels se trouve Joseph. Dès le début de la guerre, le 14e escadron fournit plusieurs détachements en renfort dans diverses unités. Entre le 2 août et le 1er septembre, le 14e escadron forme 32 unités ou formations hippomobiles et 36 sections automobiles supplémentaires. Avant l’arrivée du 3e chasseurs d’Afrique, Joseph est chargé de percevoir des chevaux. Il note à la journée du 8 août: « Pris livraison des chevaux aux cuirassiers et du fourgon à La Mouche. J’ai deux chevaux rétifs. Je suis obligé de faire à pied de La Mouche à Vaise par une chaleur accablante et une soif terrible. C’est un mauvais présage ». […]

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