Le 19 juillet 1900, le métro en projet depuis près de 50 ans ouvre enfin ses portes. Cette mise en service se fera pourtant dans la discrétion, sans grande cérémonie officielle, la presse se contentant de quelques lignes. À croire que personne n’a voulu voir son nom associé à cette entreprise par certains côtés hasardeuse. Pourtant, ce mode de transport révolutionnaire va bientôt bouleverser la vie des Parisiens.
Par Philippe-Enrico Attal
A son ouverture en 1900, le métro n’est pas une idée nouvelle. Depuis 1863, il roule à Londres suivi par New York en 1868 ou encore Berlin en 1882. Dans la capitale anglaise, l’objectif était de relier les principales gares entre elles tout en assurant une desserte de la ville aux artères passablement encombrées. Le concept totalement révolutionnaire à l’origine du projet était d’investir un nouvel espace de la ville en utilisant le sous-sol. À Paris, l’idée est également « dans l’air ». En premier lieu, il s’agit d’assurer l’approvisionnement des Halles centrales édifiées par Baltard. De leur côté, les grandes compagnies de Chemin de fer (qui se partagent le réseau avant la création de la SNCF en 1937) souhaitent prolonger leurs lignes vers le coeur de Paris. Les autorités militaires soutiennent également ce projet de nature à faciliter les mouvements de troupes. Une première étape dans ce sens a été franchie avec la construction de la Petite Ceinture à partir de 1851 qui fait le tour de la ville en reliant entre elles les principales gares. Du transport de marchandises, elle va évoluer pour accueillir finalement des voyageurs après la construction de nouvelles stations qui en feront un métro avant l’heure.
Un demi siècle de projets
Le projet Kérizouet présenté en 1845 visant à relier les Halles aux principales gares inaugure une interminable série d’occasions manquées qui va durer près d’un demi siècle. Rapidement, il va apparaître à la Ville de Paris que les intérêts de l’État et des grandes compagnies ne sont pas forcément les siens. De quel métro parle-t-on exactement ? Faut-il un chemin de fer d’intérêt général à la charge de l’État visant à la prolongation dans les rues de Paris du réseau national, ou d’un chemin de fer purement local assurant une desserte fine des différents quartiers ? L’État qui veut raccorder les grandes gares de la capitale se soucie peu de l’intérêt des Parisiens. De son côté, la municipalité envisage un réseau qui mette fin aux encombrements tout en assurant un rééquilibrage entre les différents quartiers. Le bras de fer qui va les opposer va faire perdre à Paris plusieurs décennies. C’est dans ce contexte que de nombreux projets vont voir le jour, du plus sérieux au plus fantaisiste.
Car la poésie n’est pas absente de ce dossier insoluble, tel cet inventeur qui propose de faire glisser des gondoles de réverbères en réverbères à travers les quartiers de Paris. D’autres éventrent les immeubles pour traverser la ville sans encombrer les rues. Le débat se complique encore quand on aborde la question du mode de traction. L’électricité qui nous semble aujourd’hui une évidence avait encore à cette époque un caractère expérimental. Beaucoup lui préfèrent l’air comprimé (utilisé par les tramways) ou la traction par câbles comme sur le Funiculaire de Belleville. Toutes ces cogitations semblent toutefois fantaisistes à bon nombre d’ingénieurs qui ne jurent que par la seule énergie ayant fait ses preuves, la vapeur. Le métro de Londres lui-même crache ses fumées (non sans difficultés) dans les tunnels de la ville depuis 1863. Aussi, pour limiter les nuisances inévitables, la plupart des partisans de la vapeur proposent de construire le métro en viaduc.
Un viaduc devant l’Opéra
Et c’est ainsi que s’ouvre la deuxième bataille du métro parisien : tunnel ou viaduc ? […]
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