La «Maintenon» du Grand Dauphin

Marie-Thérèse Émilie Sophie Joly de Choin naît à Bourg-en-Bresse le 2 août 1670, baptisée le jour même en la collégiale Notre-Dame, et meurt à Paris le 13 ou le 14 avril 1732. Son destin est celui d’un météore qui serait passé dans le ciel versaillais à l’époque du Roi-Soleil. Les historiens qui ont évoqué la figure de « la Choin» ont tous plus ou moins repris la caricature qu’en fit le mémorialiste Saint-Simon, l’assimilant à un laideron puant et rustique – cette description nous renseignant davantage sur le snobisme et les préjugés de courtisan du mémorialiste, plutôt que sur les qualités réelles de la demoiselle qu’il éreinte. En outre, détestant le fils de Louis XIV, Saint-Simon avait trouvé là un moyen supplémentaire de l’atteindre en diminuant sa compagne…
Par Claude Vigoureux. Historien.

Une aristocrate de province propulsée à la cour
En réalité, Marie-Thérèse Joly de Choin appartient à une famille d’ancienne noblesse savoyarde, occupant une place prééminente dans la société bressane et ayant des ramifications dans la capitale et à la cour. Son père, Guillaume Claude de Joly, chevalier, baron de Choin, Langes et Chaillouvre, est grand bailli de Bresse et gouverneur de Bourg, et sa mère, Anne Clémence Bonne de Grolée de Mépieu, est d’honorable lignage dauphinois. De fait, la demoiselle a bénéficié d’une éducation soignée, évoluant dans un environnement distingué, ce qui lui permet d’envisager des débuts prometteurs dans le monde.

Ce n’est pas sur la scène provinciale qu’à l’instar de ses aïeux Melle de Choin fait son entrée, mais à la cour, lieu mythique et théâtre glissant… En effet, sa tante, la comtesse Anne-Marie de Bury, est dame d’honneur de Marie-Anne de Bourbon, princesse de Conti, qui était la fille (légitimée) de Louis XIV et de Louise de la Vallière (et donc, la demi-soeur du dauphin). Mme de Bury obtient de sa protectrice que sa nièce la rejoigne dans son service. De méchantes langues ont dit que c’est à sa laideur que Mlle de Choin devait son introduction auprès de la princesse, laquelle avait déjà vécu des infidélités de ses amants avec de jolies demoiselles d’honneur… Trop grande, trop forte, trop bronzée, mais « de fort beaux yeux, de la dignité dans l’âme, de la douceur, des agréments infinis dans la conversation», telle est la personne selon les témoins, qui soulignent un paradoxe: Mlle de Choin «ne plaisait pas : elle charmait».

Malheureusement, ce n’est pas le portrait fantaisiste, dessiné au XIXe siècle, qui permettra de se faire une idée juste du physique de Mlle de Choin. L’imagination seule peut y suppléer, sachant que les canons de beauté diffèrent d’une époque à l’autre et que chez Marie-Thérèse, les qualités humaines et l’intelligence devaient compenser les manquements aux critères de la beauté du Grand Siècle… […]

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