C’est des invasions de 1814-1815 et de la mise en tutelle de la France qui les a suivies que date vraiment la prise de conscience de la vulnérabilité de Paris alors que pendant tout le siècle précédent la plupart des fortifications de la monarchie avaient été soit abandonnées, soit démolies. Les nouvelles organisations défensives ne verront le jour que sous Louis-Philippe, en gros de 1840 à 1846. Le vrai artisan en est M. Thiers qui parviendra à décider un Parlement réticent (1) à construire une enceinte continue fortifiée à la Vauban de 33 km de tour avec 94 bastions, fossés, glacis, elle-même distante de 1,5 km à 5 km d’une ceinture de 16 forts dits détachés. Cette double enveloppe est la définition d’un camp retranché et, depuis cette époque, on ne parlera plus que du Camp Retranché de Paris ou CRP.
Par André Bourachot
La guerre de 1870 et l’investissement de Paris par les Prussiens feront croire que les fortifications de M. Thiers avaient sauvé Paris d’un coup de main et que, seul, un siège en règle avait obligé la capitale à se rendre. Pourtant, pour différentes raisons, notamment le manque d’artillerie de siège immobilisée loin de Paris par suite de la destruction des voies ferrées, les Allemands n’ont jamais fait le siège de la capitale, sinon ils l’auraient prise beaucoup plus tôt ; ils se sont contentés d’en faire le blocus, ce qui est militairement très différent ! Cependant, on retiendra que les progrès de l’artillerie avaient été tels de 1850 à 1870 que les Prussiens avaient pu quasi impunément bombarder les forts, l’enceinte et même le sud de la ville. Et, dès 1871, les militaires et au premier chef les officiers du génie, dont et surtout le général Séré de Rivières, se mettent à réfléchir à la construction de nouveaux forts.
C’est sur tout le territoire national, y compris sur les côtes, que va s’abattre une étonnante démesure fortificatrice que seule la défaite peut expliquer mais certainement pas justifier. Nous ne la développerons pas ici, sauf pour signaler que, tout autour de Paris, on construira, dans ce qu’on appelle trois régions fortifiées, Nord, Est et Sud-Ouest, 18 forts plus ou moins importants et un grand nombre de redoutes et batteries, ces dernières surtout à l’ouest de la capitale, déjà naturellement protégée par les boucles de la Seine. Et, Séré de Rivières, secrétaire de la commission de défense, n’hésitera pas à écrire (2) : « […] le système proposé assurera à tout jamais la défense de Paris », tout en ajoutant « qu’il rendra impossible tout investissement efficace » ! Tous ces nouveaux forts, sont construits, comme les précédents, en maçonneries, avec leurs superstructures hérissées de canons (jusqu’à 80), mais les oeuvres vives (casernes, poudrière, etc.) sont, cette fois, abritées sous plusieurs mètres de terre. Ils sont érigés, sans grande imagination, là où…les Prussiens avaient installé leurs batteries de siège et, donc, plus loin que les forts détachés de 1840. […]
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