Dix jours après avoir abdiqué, Napoléon Bonaparte écrit à Joséphine, le 16 avril 1814 : «Je vais dans ma retraite substituer la plume à l’épée.» Il envisage en effet de raconter et d’expliquer l’histoire de son règne. La plume lui apparaît comme le complément nécessaire de son action militaire et civile. Le chef de guerre et le chef d’État entendent céder le pas au mémorialiste. Il y aura certes le sursaut des Cent-Jours, mais le programme d’action des années de solitude est bel et bien tracé dès le printemps 1814.
En souhaitant reprendre la plume en 1814, Napoléon n’innove pas. Il ne fait que poursuivre une vocation d’écrivain née dès les années de jeunesse quand il était en garnison dans le sud de la France. C’est alors que se forge le Napoléon écrivain, celui dont Thiers et plus tard Sainte-Beuve pourront dire qu’il fut le plus grand écrivain du siècle.
Les balbutiements d’un écrivain
En novembre 1803, alors qu’il est au camp de Boulogne, Napoléon Bonaparte dîne à plusieurs reprises avec Claire de Rémusat, venue rejoindre son mari, préfet du palais, tombé malade. Au cours de conversations auxquelles le Premier consul semble prendre un certain plaisir, il se confie et raconte notamment quelques souvenirs de jeunesse. «Lorsque j’entrai au service, je m’ennuyai dans mes garnisons ; je me suis mis à lire des romans, et cette lecture m’intéressa vivement. J’essayai d’en écrire quelques-uns ; cette occupation mit du vague dans mon imagination, elle se mêla aux connaissances positives que j’avais acquises, et souvent je m’amusais à rêver, pour mesurer ensuite mes rêveries au compas de mon raisonnement. Je me jetai par la pensée dans un monde idéal, et je cherchai en quoi il différait précisément du monde où je me trouvais. J’ai toujours aimé l’analyse, et, si je devenais sérieusement amoureux, je décomposai mon amour pièce à pièce … »
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