Les monnaies des rois de Versailles

En 1640, sous le règne de Louis XIII, est créé le louis qui succède à l’écu d’or. C’est la première monnaie d’or à l’effigie du roi depuis le court règne d’Henri II. Elle est frappée sous la forme du louis, du demi-louis et du double louis jusqu’à la mort du monarque, au château neuf de Saint Germain-en-Laye, le 14 mai 1643. Exceptionnellement, on frappera des espèces conçues pour le seul jeu du roi : ainsi les quatre, huit et dix louis, ce dernier avec une variété au buste drapé évoquant l’aureus des empereurs romains.
Par Patrick Devaux, Membre de la Société française de Numismatique

Hormis une réforme importante mais avortée, entreprise par Henri III en 1575, construite autour de l’écu d’or et de ses divisions en argent et en cuivre, le système monétaire de l’Ancien Régime était ainsi construit : l’unité de compte était la livre (ou le franc : le terme apparaît indifféremment dans le théâtre de Molière ou de Marivaux), elle-même divisée en vingt sols et le sol en douze deniers. C’était le système pratiqué par la Grande-Bretagne jusqu’au milieu des années soixante avec une livre sterling de vingt shillings, le shilling valant douze pence (le penny était représenté par la lettre D en souvenir du vieux français denier).

Le cadre général du système monétaire

Sous l’Ancien Régime, les métaux utilisés étaient l’or, l’argent et le cuivre, parfois aussi le billon, alliage d’argent et de cuivre. Pendant la Révolution, la détresse financière amena à frapper des sols à partir du bronze des cloches d’églises que l’on avait fondues. À partir de 1640, les monnaies reçurent des noms définitivement fixés (comme chez nous les anciens billets familièrement appelés Hugo : 5 francs ; Richelieu : 10 F ; Racine puis Diderot : 50 F ; Bonaparte puis Delacroix : 100 F ; Montesquieu : 200 F ou Pascal : 500 F). Ainsi connaissait-on la hiérarchie descendante suivante : double louis, louis, demi-louis pour l’or ; l’écu d’argent et ses divisions ; le sol, le demi-sol et enfin le liard, la plus petite monnaie, valant trois deniers, tous trois en cuivre. Aucune mention de la valeur en unité de compte ne figurait sur ces pièces (« sonnantes et trébuchantes »).
Cette spécificité permettait de déterminer, notamment par ordonnance royale, par lettre patente ou arrêt du Conseil, la valeur de la pièce en unité de compte en fonction d’un rapport avec le poids en métal. Ainsi le louis d’or était-il défini en 1640 par un poids officiel de 6,752 grammes de métal à 917°/°° d’or fin. Avant les mutations monétaires qui commencèrent en 1689, l’écu d’argent valait 3 livres et le louis d’or (« en or » disait Saint-Simon) 10 puis 11 livres.

Une autre donnée doit être précisée : si le droit de battre monnaie était d’essence régalienne, en revanche la frappe effective des espèces n’était pas centralisée à Paris mais déconcentrée dans les ateliers de fabrication des capitales de province. Les degrés d’activité des ateliers varièrent selon les époques. Pour s’en tenir à une période bien documentée (entre 1726 et 1785), on relève les productions suivantes : Paris, plus de 400 millions de livres ; Bayonne entre 300 et 400 ; Pau de 200 à 300 ; Lyon, Lille, Strasbourg, Aix, de 100 à 200 ; Nantes, Rennes et Rouen, de 50 à 100 ; La Rochelle et Riom, de 20 à 50 ; Bourges, Dijon, Grenoble et Poitiers, moins de 20 millions. Sous Louis XIII, vingt-deux ateliers royaux ont fonctionné dans de grandes villes de province (indépendamment des frappes seigneuriales qui pouvaient encore exister) dont deux pour le Béarn (Pau et Morlaàs) et un pour la Navarre (Saint-Palais) puisque, depuis 1589, le roi de France était aussi roi de Navarre, cette double titulature apparaissant sur toutes les monnaies. […]

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