Au cours de la Grande Guerre, les tirailleurs et spahis algériens ont mené, avec les soldats français, les mêmes combats dans les mêmes conditions. De la nécropole nationale de Notre-Dame de Lorette aux champs de bataille de l’Hartmannswillerkopf, en passant par l’ossuaire de Douaumont, le sacrifice consenti par les troupes d’Afrique du Nord, et plus particulièrement par les Algériens musulmans, est encore de nos jours perceptible. Les nombreuses stèles musulmanes des cimetières militaires et les monuments commémoratifs érigés en leur honneur célèbrent leurs faits d’armes.
Commandant Michaël Bourlet, Écoles militaires de Saint-Cyr Coëtquidan
En 1914, l’Algérie coloniale est à son apogée. Elle est l’un des premiers partenaires commerciaux de la Métropole. Cette prospérité attire des milliers d’Européens. Ils sont intégrés aux immigrants français ainsi qu’aux Juifs, naturalisés en 1870 à la faveur des lois de naturalisation, de l’école obligatoire et du service militaire. Cette communauté de 750 000 personnes cohabite avec 4 500 000 musulmans, ou « indigènes », dont la majorité n’est pas associée à cette réussite.
Quand la guerre est déclarée, la mobilisation s’effectue parfaitement en Algérie. Les Français d’Algérie sont mobilisés dans les mêmes conditions qu’en métropole. De 1914 à 1918, 73 000 Français d’Algérie servent dans l’armée française. Ce contingent est renforcé par les hommes nés en Algérie de parents étrangers et qui ont opté, à l’âge de leur majorité, pour la nationalité française. Près de 60 % des fils d’étrangers font ce choix. Enfin, en 1914, environ 30 000 Musulmans servent dans l’armée française. Leur recrutement s’effectue selon deux modes: le volontariat et dans une moindre mesure, la conscription, introduite en 1912. Discrète dans un premier temps, la conscription est généralisée à partir de 1916. Elle s’accompagne d’abus et de « chasse à l’homme » mais aussi, progressivement, de l’octroi d’avantages offerts aux soldats et à leur famille comme des primes d’engagements, des soldes identiques à celles des Français ainsi que des pensions et indemnités.
Au total, environ 173 000 Algériens musulmans sont incorporés dans l’armée française (80 000 appelés et 60 000 rengagés) pendant la guerre et près de 125 000 d’entre eux servent en France. Ces hommes sont majoritairement incorporés dans les unités du 19e Corps d’Armée (Algérie et Tunisie) qui forment, avec les troupes du corps expéditionnaire stationnées au Maroc, la fameuse « Armée d’Afrique ». La dénomination, qui n’est plus officielle depuis 1870, a été conservée par tradition. Les soldats européens (engagés et appelés) servent dans les régiments de zouaves (infanterie) et de chasseurs d’Afrique (cavalerie). La Légion étrangère est composée de soldats de métier aux origines diverses tandis que les unités disciplinaires sont composées majoritairement de Français condamnés par la justice militaire et venus majoritairement de métropole. Quelques appelés et beaucoup d’engagés musulmans sont incorporés dans les troupes indigènes composées de fantassins, de tirailleurs, et de cavaliers, les légendaires spahis. Ces soldats sont encadrés par des officiers indigènes et européens. […]
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