Née le 8 septembre 1749, Yolande de Polastron perd à l’âge de trois ans sa mère, la comtesse de Polastron. À dix-huit, elle épouse le comte Jules de Polignac. Le jeune couple vit sans éclat, partageant son temps entre Claye-en-Brie et l’hôtel Fortisson, rue des Bons enfants à Paris. En mai 1768, Yolande accouche d’une petite fille, Aglaé. Le 15 janvier 1771, elle met au monde Armand, son premier fils. La famille, bien que de noblesse honorable, ne vit pas dans l’opulence, ce qui la tient le plus souvent éloignée de la cour de Versailles. Cette semi-retraite dure huit années, jusqu’à ce jour de juin où la reine Marie-Antoinette remarque la jeune femme. Le destin de Yolande de Polignac est en marche.
Par Inès de Kertanguy, Historienne.
En juin 1775, la reine donne au château de Versailles une fête qui ouvre la saison d’été. Ce soir-là, et par extraordinaire, le beau-père de Yolande l’emmène au château de Versailles. Il fait une chaleur étouffante. Dans un coin du salon, Marie-Antoinette remarque des jeunes gens qui ne dansent pas. Agacée comme peut l’être une maîtresse de maison qui s’occuperait du bon déroulement du bal, elle les invite un peu brusquement à sortir. L’intervention jette un froid, si bien que même ceux qui dansaient s’arrêtent. Marie-Antoinette semble ne pas comprendre cette soudaine bouderie. Yolande, qui a assisté à la scène, s’approche de la reine et lui explique avec naturel et douceur : «– Madame, Votre Majesté, en faisant à ces dames l’honneur de les admettre à ces bals n’a sûrement pas eu l’intention de leur donner la mortification, comme elle vient de le faire, d’en chasser leurs maris et leurs frères dont la plupart sont des danseurs. – Non, madame, je n’ai pas dit cela pour eux, mais pour beaucoup de personnes qui ne dansent pas. » Se rendant compte de sa bévue, la reine s’empresse de rappeler les jeunes gens. Le salon se remplit à nouveau. L’incident est clos. Reconnaissante, Marie-Antoinette va vers Yolande de Polignac, elle prend ses mains dans les siennes : « Je n’oublierai jamais que vous m’avez donné une marque d’estime et d’attachement en me faisant apercevoir d’une action qu’on aurait pu interpréter contrairement à mon action… Je désire votre amitié, faites-moi le plaisir de venir demain déjeuner avec moi.»
À l’époque de leur rencontre, Marie-Antoinette vient de faire nommer sa grande amie la princesse de Lamballe surintendante. Une charge considérable qui fait murmurer toute la cour et qui, aussitôt, suscite cabales et jalousies. La surintendante, qui n’était pas préparée à endosser un tel rôle, se plaint souvent. Trop souvent. Et Marie-Antoinette se lasse. Yolande de Polignac ne demande rien. Elle vit comme dans un rêve et donc avec naïveté son amitié avec la reine. Si l’on en croit Moreau, Marie-Antoinette, qui veut avoir sa nouvelle amie près d’elle, lui aurait offert le poste de dame d’atours. « Je ne puis vivre à la cour, aurait répliqué la jeune femme, j’habite la campagne, car notre fortune ne nous permettrait pas de soutenir toute l’année le train qu’exige Paris et Versailles.» Cette réponse n’est certes pas celle d’une femme intéressée ; pourtant, les choses vont changer car Yolande a une famille, des amis et même un amant. Et tous entendent tirer parti de cette amitié providentielle avec la reine. […]
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